Violences sexuelles à l’UQAM : Les luttes féministes et la Politique 16

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Par Julie Beauchamp, responsable des délégué-e-s

Les consultations sur la Politique 16 ont finalement été lancées en mai dernier. Jusqu’au 30 septembre, les différentes unités et les membres de la communauté de l’UQAM sont invité-e-s à formuler des avis et des commentaires sur le projet de politique proposé. Le SÉTUE organise d’ailleurs un midi-discussion le jeudi 20 septembre pour que ses membres émettent des critiques ou fassent des suggestions pour améliorer la politique.

Résultant des travaux du Comité institutionnel contre le harcèlement sexuel entre 2013 et 2018, le projet de Politique 16 vise à dénoncer collectivement et à mettre fin au sexisme et aux violences à caractère sexuel. Il témoigne de la volonté d’inscrire le harcèlement sexuel dans une perspective plus large visant la promotion d’une véritable culture du consentement au sein de l’institution. Conformément aux exigences de la Loi visant à prévenir et à combattre les violences à caractère sexuel dans les établissements d’enseignement supérieur adoptée par Québec en 2017, la politique prévoit par ailleurs l’obligation pour l’UQAM d’offrir des formations de sensibilisation obligatoires à tou-te-s les membres de la communauté et tout spécialement aux personnes en situation d’autorité.

Tout en saluant le travail de longue haleine du Comité, il semble toutefois important de se rappeler que c’est véritablement par les luttes féministes et le courage des personnes qui dénoncent les violences sexistes que ces enjeux ont obtenu de la visibilité, tant à l’UQAM que dans l’espace public.

Bref retour sur les luttes féministes à l’UQAM1

Depuis la fondation de l’UQAM, des femmes se mobilisent autour de différents enjeux féministes liés à leur statut d’étudiantes, de chargées de cours ou de professeures, notamment sur la question du harcèlement et des agressions sexuelles. Par exemple, dans les années 1980, le comité de la condition féminine du Syndicat des chargé-e-s de cours (SCCUQ) a fait adopter une résolution spécifiant que celui-ci ne défendrait pas ses membres accusés de harcèlement ou d’agression sexuelle (le SÉTUE a par ailleurs adopté une résolution similaire en 2016). Des actions collectives ont également été menées contre des personnes ayant des comportements harcelants, ainsi que dans les salles de classe de professeurs tenant des propos explicitement misogynes et antiféministes durant leurs cours.

D’autre part, trois ans après l’adoption en 1989 de la Politique 16 sur le harcèlement sexuel, des étudiantes ont dénoncé le fait que les processus administratifs de plaintes restaient aussi inadéquats qu’inefficaces, alors que l’administration de l’UQAM refusait toujours de prendre ses responsabilités face aux enjeux du harcèlement et des agressions sexuelles. Devant cette inaction, elles ont formé la Brigade rose, un collectif féministe radical autonome qui mena différentes actions silencieuses de dénonciation au sein de l’UQAM. C’est suite à une conférence de presse lors de laquelle la Brigade exige de l’UQAM une déclaration publique contre le harcèlement et l’embauche d’une intervenante spécialisée en violences sexuelles que l’institution annonce finalement la prise de nouvelles mesures allant en ce sens.

Plus récemment, à l’automne 2013, en réaction à une initiation étudiante marquée par des propos sexistes et faisant la promotion de la culture du viol, diverses actions féministes ont eu lieu et une lettre collective signée par des étudiant-e-s, des chargé-e-s de cours et des professeur-e-s, fut envoyée à la direction de l’UQAM. C’est grâce à ces pressions que le Comité de révision de la Politique 16 est mis sur pied pour travailler à sa réactualisation. Une première réunion a lieu en mai 2014.

Dénonciations publiques récentes

Les dénonciations publiques se multiplient depuis les dernières années, au Québec comme ailleurs, avec notamment les mouvements #AgressionsNonDénoncées en 2014, et #moiaussi et #BalanceTonPorc en 2017 – démontrant l’ampleur du problème du harcèlement et des agressions sexuelles.

Les dénonciations publiques touchent également l’UQAM alors qu’en octobre 2014 des étudiantes posent des autocollants sur les portes de bureau de certains professeurs par lesquels elles les dénoncent : «Harcèlement, attouchement, voyeurisme, agressions. Tolérance zéro. Politique 16. Non à la culture du viol. Brisons le silence contre le harcèlement sexuel». S’ensuit une manifestation interne en novembre durant laquelle d’autres autocollants sont posés pour décrier l’inaction de l’UQAM et le ressac antiféministe.

Décidément, l’enjeu du harcèlement sexuel et des agressions sexuelles n’est pas nouveau à l’UQAM. Mais encore et toujours, on constate que ce sont les luttes féministes et les dénonciations publiques qui forcent l’institution à sortir de son laxisme. Ce sont donc les personnes ayant mené ces luttes depuis la fondation de l’UQAM que nous devons remercier en premier lieu pour la sortie de la nouvelle Politique 16. Il ne reste plus qu’à espérer que l’UQAM déploie les ressources nécessaires à son application pour s’engager fermement dans la lutte au sexisme et aux violences à caractère sexuel sur le campus.

1 Cette partie s’inspire fortement de l’article «UQAM champ de bataille: Histoire (incomplète) des actions féministes sur le campus» paru le 8 mars 2015 sur la plateforme Françoise Stéréo: http://francoisestereo.com/uqam-champ-de-bataille-histoire-incomplete-des-actions-feministes-sur-le-campus/.

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