Le Devoir : Bilinguisation de l’UQAM – Un précédent dangereux

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“Accepter volontairement la régression n’a rien de génial. Nous n’avons pas à chercher à plaire par tous les moyens à des gens qui ne pourront se satisfaire de moins que d’un bilinguisme imposé qui conduit à une désintégration culturelle et sociale […] en espérant que ceux qui n’ont pas compris finiront par comprendre.” Camille Laurin

C’est avec beaucoup de consternation que nous avons appris le 1er septembre dernier que six cours de gestion seront offerts exclusivement en anglais à l’Université du Québec à Montréal (UQAM). Cette situation constitue un recul important par rapport aux progrès que notre nation a enregistrés de peine et de misère au fil des ans.

Tout d’abord, l’UQAM est une université francophone. Il est donc inadmissible que des étudiants soient forcés de maîtriser l’anglais pour pouvoir réussir les cours en question. Des cours semblables sont probablement proposés dans des universités anglophones comme McGill ou Concordia. Les étudiants, en faisant le choix de s’inscrire à l’UQAM, souhaitent poursuivre leurs études en français.

D’aucuns nous diront que l’anglais est la langue des affaires et que la décision du département est des plus compréhensibles étant donné qu’il s’agit de cours de gestion. Or, si la connaissance de l’anglais constitue un avantage indéniable sur le marché du travail, elle ne doit aucunement constituer un préalable pour occuper un emploi à l’intérieur des frontières du Québec. L’individu qui fait le choix de ne parler que sa langue nationale se coupe de la réalité mondiale, mais personne n’a le droit de lui imposer l’apprentissage d’une seconde langue. Au Québec, la langue des affaires, c’est la langue française, et la défendre n’est aucunement un signe de fermeture.

En 1977, Camille Laurin a courageusement mis en place la loi 101. Par la vaste francisation des entreprises qu’elle impliquait, non seulement elle a permis aux Québécois de prendre le contrôle de leur économie, elle a également mené à l’enrichissement de plusieurs commerçants anglophones, qui pouvaient désormais compter sur une nouvelle clientèle francophone qui n’hésitait plus à fréquenter ces lieux car ces derniers pouvaient maintenant leur offrir des services dans leur langue nationale. Or la décision de l’École des sciences de la gestion ouvre la voie à un immense retour en arrière. Le Forum jeunesse du Bloc québécois ne souhaite aucunement retourner à la situation qui prévalait avant 1977.

Dans un contexte où la langue française est constamment menacée et où nous sommes devenus minoritaires sur l’île de Montréal, où est située ladite université, cela est d’autant plus condamnable. L’ESG a agi ainsi afin de «doubler» le nombre de nouveaux arrivants. Il y a fort à parier qu’une trop grande proportion de ces derniers n’apprendra pas le français. Proposer l’enseignement en anglais n’oblige aucunement les nouveaux arrivants à se concentrer sur l’apprentissage de la langue locale.

Il faut se rappeler que le réseau des universités du Québec fut mis sur pied en 1969 dans le but d’offrir aux Canadiens français un système d’éducation démocratique et accessible qui lui faisait auparavant grandement défaut. L’UQAM, surnommée «l’université du peuple», est un bel héritage de la Révolution tranquille. Le but de l’École des sciences de la gestion, qui détient une excellente réputation, était que notre peuple puisse lui aussi avoir ses cadres et ses entrepreneurs, qu’il puisse lui aussi avoir sa juste part de son économie nationale.

Les fédéralistes ont toujours tenté de déconstruire notre identité collective en s’en prenant à nos acquis. Que ce soit en prenant d’assaut notre histoire nationale par des projets comme la reconstitution de la bataille des plaines d’Abraham ou par les attaques répétées de la Cour suprême contre nos lois linguistiques, l’État fédéral fait tout en son pouvoir pour faire du peuple québécois une minorité inoffensive dans un ensemble multiculturel et centralisé à l’extrême.

Aujourd’hui, la menace ne vient même pas des élites fédéralistes, mais des administrateurs d’un de nos joyaux collectifs, qui par la porte qu’ils viennent d’ouvrir deviennent dans les faits les complices de nos adversaires. Les haut placés de l’École des sciences de la gestion de l’UQAM mettent en péril nos acquis en créant un dangereux précédent. Non seulement contribuent-ils à déconstruire l’université que nous avons collectivement bâtie, ils contribuent également à faire régresser la Charte de la langue française en touchant à deux de ses plus importants volets: l’éducation et l’économie. Depuis la thérapie de choc du Dr Laurin, nous avons enregistré des victoires et des échecs. Trop de ces derniers sont venus de nous-mêmes.

Le Forum jeunesse du Bloc québécois demande à l’administration de l’Université du Québec à Montréal de revenir sur sa décision, d’annuler les six cours en question pour ensuite les offrir en français. Sinon, son irresponsabilité nous coûtera cher, collectivement.

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Ont signé ce texte: Simon-Pierre Savard-Tremblay, Jason Bischoff, Arianne Bouchard, Sarah Désilets-Rousseau, Isabelle Hétu, Jean-François Landry, Philippe Leblanc-Lamothe, Marie-Andrée Plante et Jean-René Roy.

Consultez l’article intégral de l’édition des 4 et 5 septembre 2009 du Devoir.

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