Ceci est un article publié dans le Journal de la rentrée d’Automne 2019.
L’UQAM accueillait ses premier·ère·s étudiant·e·s, il y a maintenant cinquante ans. Ouverte dans la précipitation à la suite de l’effervescence étudiante du « Moment 68 » québécois, l’UQAM et le réseau de l’Université du Québec marqueront dès lors la transformation de l’éducation supérieure québécoise, mais aussi les mouvements qui agitent la société québécoise. Nous souhaitons revenir sur l’histoire de l’UQAM afin de mettre de l’avant plusieurs moments de lutte qui l’ont traversée. L’héritage de ces luttes continue à habiter l’université et à inspirer les étudiant·e·s et salarié·e·s qui composent la communauté universitaire.
Une naissance dans la contestation
L’ouverture de l’UQAM fait suite à la création des cégeps en 1967. Avec la démocratisation de l’éducation, le nombre d’étudiant·e·s pré-universitaires explose et les places dans les universités francophones sont terriblement insuffisantes. Au moins 65% des étudiant·e·s inscrit·e·s dans les programmes pré-universitaires ne pourront faire leur entrée à l’université l’année suivante. En 1968, un grand mouvement de mobilisation en faveur de l’instauration d’une seconde université francophone est lancé par les étudiant·e·s du CÉGEP de Lionel-Groulx. Le mouvement cherchera à forcer la main du gouvernement en occupant les institutions scolaires du Québec. Le printemps suivant, « l’Opération McGill » voit le jour. Cette campagne, qui réunissait à la fois des groupes étudiants, syndicaux, socialistes et indépendantistes, avait pour objectif de faire de McGill une université francophone et populaire. Cette campagne culmina le 28 mars 1969 par une manifestation de plus de 15 000 personnes qui se sont dirigées vers la porte grillagée de l’université et ont tenté de rentrer de force sur le terrain de celle-ci. Cette manifestation marquera l’histoire québécoise comme étant la plus importante manifestation depuis la fin de la seconde guerre mondiale à Montréal.
Sous la pression des étudiant·e·s de cégeps occupés et de « l’Opération McGill », le gouvernement unioniste de Jean-Jacques Bertrand accéléra au printemps 1969 la fondation de l’UQAM afin d’ouvrir dans la précipitation l’Université nouvelle à l’automne 1969.
Années 1970 : syndicalisme de combat et grèves
Les premières années de l’UQAM furent marquées par la contestation syndicale, étudiante et professorale. L’Université a été créée dans la contestation et cet esprit se transposa au sein des différents éléments la composant. En avril 1971, les employé·e·s de l’UQAM (SEUQAM) choisissent le syndicalisme de combat pour faire face au patronat. Par la suite, c’est au tour du syndicat des professeur·e·s de faire pression sur l’administration de l’UQAM. Les étudiant·e·s ne sont pas en reste, ils et elles feront la grève pour leurs frais de scolarité dès 1973 à travers le premier regroupement étudiant: Le comité d’organisation provisoire des étudiants de l’UQAM (COPE-UQAM).
1980-1990 : la normalisation des mouvements sociaux
Au tournant des années 1980, on assiste à la révolution conservatrice en Occident. En effet, les gouvernements Thatcher, Reagan et celui de René Lévesque vont mettre en place une série de mesures néolibérales qui porteront un dur coup aux mouvements progressistes. Ce contexte de révolution néolibérale ne touchera pas immédiatement l’UQAM. D’importants mouvements agiteront celle-ci au cours des années 1980, dont la grève étudiante de 1986 et la grève des chargé·e·s de cours de 1988. Néanmoins, la révolution néolibérale rattrapera la communauté uqamienne au cours des années 1990 alors que les mouvements étudiants et syndicaux connaîtront un essoufflement au sein de l’UQAM.
Les années 2000 : l’UQAM au cœur des luttes
Les attaques contre l’accessibilité et la qualité de l’éducation sont nombreuses durant les deux mandats des Libéraux de Jean Charest. La première concerne le programme de prêts et bourses (AFE) qui est réformé afin de réduire la portion de bourses au profit des prêts. La mobilisation des étudiant·e·s du Québec et de l’UQAM porte ses fruits. Après un peu plus de huit semaines de grève, le gouvernement recule. Ce dernier répliquera en 2012 avec, cette fois-ci, une hausse des frais de scolarité. Les étudiant·e·s répondront par la plus grande grève de l’histoire du Québec, poussant même la ministre de l’Éducation à démissionner.
Quelques années avant le mouvement MeToo, les militant·e·s féministes de l’UQAM dénoncent les agressions sexuelles qui ont cours dans l’Université. Ce qui fût appelé le Stickergate (la pose de collant sur les portes de professeurs agresseurs) a fait prendre conscience des agressions qui surviennent dans le milieu universitaire. Le mouvement a libéré la parole pour plusieurs victimes qui n’étaient désormais plus seules à prendre la parole.
D’hier à aujourd’hui
En conclusion, l’histoire de l’UQAM est parsemée de luttes que nous avons seulement effleurées. Au cours de l’année à venir plusieurs activités seront organisés par les syndicats et associations étudiantes de l’UQAM afin de célébrer la tradition de lutte de l’UQAM.
par Carl Robichaud, délégué syndical