C’est avec la rage, l’indignation et un profond sentiment d’injustice au cœur que des centaines de manifestants ont pacifiquement pris d’assaut les rues du centre-ville de Montréal, samedi après-midi, pour dénoncer les abus et les arrestations arbitraires commis lors du récent sommet du G-20 à Toronto.
Deux semaines après une première marche de protestation dans la métropole, le 1er juillet, les protestataires sont revenus à la charge ce week-end en tenant une manifestation simultanément avec une dizaine d’autres villes canadiennes.
«Répression de l’opinion = régression», «Les vrais casseurs sont chefs d’État», «Réclamons notre liberté d’opinion», autant de slogans inscrits sur les pancartes des manifestants.
«Nous demandons le retrait de toutes les accusations portées contre les personnes arrêtées. On parle de criminalisation de la dissidence, de la contestation. Ce qu’on a vu à Toronto, c’est vraiment un flash photo de ce qui pourrait arriver, c’est ce qui nous inquiète à long terme», dit Mathieu Francoeur, porte-parole de la Convergence des luttes anticapitalistes 2010 (CLAC).
Au terme du sommet qui s’est tenu fin juin, plus de 1000 personnes ont été arrêtées. De ce nombre, environ 300 ont été accusées, dont une centaine de Québécois, indique la CLAC.
Kidnappé par la police
Les manifestants ont quitté le square Phillips vers 14 heures pour effectuer un parcours passant notamment par les rues De Maisonneuve, Guy, René-Lévesque, Peel et Saint-Antoine. Malgré le pluie torrentielle et le vent qui faisait s’envoler leurs pancartes, ils ont calmement marché pendant plus d’une heure, sous l’œil attentif des policiers, pour terminer leur manifestation au square Victoria.
«Je me suis fait arrêter et je suis ici pour dire que ce n’est pas ça qui va me faire fermer la gueule», lance Éric, un Montréalais de 20 ans incarcéré à Toronto pendant une dizaine d’heures, le 27 juin. Relâché sans aucune accusation, le jeune homme raconte qu’il a été arrêté alors qu’il circulait en voiture à des kilomètres de toute manifestation.
«On avait une plaque du Québec, ils nous ont arrêtés et ont fouillé l’auto. Dans le coffre, les policiers ont trouvé un livre sur l’anarchisme et ça leur a suffi. J’ai été kidnappé par la police», dénonce-t-il.
Conditions inhumaines dénoncées
Les histoires d’horreur des manifestants arrêtés lors du G-20 se multiplient depuis la fin de l’événement.
Encore sous le choc de ce qu’elles ont vécu, trois jeunes femmes incarcérées durant plus de 60 heures à Toronto tenaient à prendre part à la manifestation de ce samedi.
«On dormait dans un gymnase et on s’est fait réveiller par des policiers avec des fusils à balles de caoutchouc et des Taser guns», raconte l’une d’elles, qui préfèrent garder l’anonymat parce que des accusations pèsent contre elles.
«Le plus difficile a été d’être privée d’eau pendant tout ce temps. Il fallait supplier pour en avoir, et encore», dit-elle.
Pour son amie, le plus difficile a été le froid. «Nous étions dans des cages sur des planchers de béton. Il faisait froid et nous n’avions rien pour nous réchauffer, dit-elle. Et pendant tout ce temps, tu ne sais pas ce qui va t’arriver et tu ne peux pas communiquer avec l’extérieur.»
Les personnes arrêtées à Toronto affirment avoir été intimidées, humiliées, menacées et maltraitées par les forces de l’ordre.
La CLAC, tout comme l’Association pour une solidarité syndicale étudiante (ASSÉ), le Front commun des personnes assistées sociales du Québec (FCPASQ) et le Regroupement intersectoriel des organismes communautaires de Montréal (RIOCM), joint sa voix à celles qui réclament une enquête publique sur les agissements des autorités lors du sommet pour faire toute la lumière sur les événements.
Consultez l’article intégral de Marilou Séguin publié dans l’édition du 17 juillet 21010 de Rue Frontenac.