Déclaration ouverte: Accord économique et commercial Canada-Union européenne

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Mardi 28 septembre 2010

Nous, les soussignés, émettons de sérieuses réserves quant à la portée et à la procédure de l’Accord économique et commercial global Canada-Union européenne (AECG) qui est proposé. Nous revendiquons ce qui suit de la part du Canada et des provinces et territoires :

1. Pleine transparence : Lors des négociations antérieures, le public en est resté complètement ignorant jusqu’à ce qu’un accord final ait été conclu. Ceci est inacceptable. Dans le cas de l’AÉCG, qui est plus ambitieux que l’ALÉNA et qui aura des conséquences plus déterminantes sur les politiques, programmes, réglementations et services publics fédéraux, provinciaux et municipaux, le public a droit à une pleine divulgation des informations au même titre que le droit à une participation informée dans les négociations.

2. Évaluation d’impact globale : Un document de consultation publié par la Commission européenne contient des questions adressées principalement au monde des affaires. De même, les consultations effectuées en ligne par le ministère canadien des Affaires étrangères et du Commerce international sont insuffisantes. Il n’y a eu aucune étude préliminaire indépendante, ni débat ou consultation entre les intervenants. Nous éprouvons le besoin d’une évaluation d’impact globale de l’accord commercial bilatéral proposé portant sur l’économie, l’emploi, la pauvreté, les genres, les droits de la personne, la culture et l’environnement au Canada et dans l’Union européenne.

3. Protection des services publics : Tout accord devrait assurer la pleine protection des services publics tels qu’ils sont assurés par le système actuel, ainsi que la possibilité d’en créer de nouveaux, sans réserves et sans conséquences négatives de la part d’un accord commercial. Les gouvernements doivent conserver leur autorité dans le fait de favoriser les services publics, tels que l’épuration et la distribution des eaux, sans avoir à craindre que de telles politiques puissent constituer un obstacle au commerce des services par des sociétés de l’Union européenne.

4. Politique sociale renforcée : Les gouvernements ont la responsabilité d’assurer que l’accès universel aux soins de santé publics et les autres programmes sociaux soient protégés dans les accords commerciaux. Tout accord global avec l’Europe doit comporter l’engagement des gouvernements envers le plein emploi, le travail décent, la citoyenneté sociale et la suppression de la pauvreté.

5. Les marchés publics sont un outil précieux pour les pouvoirs publics : L’accord ne devrait comprendre aucun engagement permettant d’ouvrir ou de libéraliser les marchés publics au niveau infranational, particulièrement celui du municipal. Les provinces, territoires et villes canadiennes doivent conserver la possibilité d’utiliser des fonds publics destinés à soutenir un développement économique local durable. Le Canada et tous les autres États membres de l’UE doivent ratifier la convention no 94 de l’OIT portant sur les clauses sociales dans les marchés publics.

6. Droit à la réglementation : Des réserves devraient protéger entièrement le droit à la réglementation interne relativement aux services publics, la culture, les finances, la santé publique et l’environnement. Les initiatives d’harmonisation de la réglementation doivent adopter des normes élevées aussi bien au Canada que dans l’Union européenne. Les municipalités, provinces et territoires, ainsi que le gouvernement fédéral, doivent conserver le droit d’établir des normes de protection encore plus élevées que celles existant actuellement dans l’union européenne ou chez tout autre partenaire commercial.

7. Protéger notre souveraineté culturelle : La ratification par le Canada de la Convention sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles, adoptée en 2005 par l’UNESCO, doit résulter dans l’exclusion systématique des biens et services culturels d’un éventuel accord commercial avec l’Union européenne. Le Canada et les provinces doivent pouvoir adopter toutes les politiques culturelles et linguistiques jugées nécessaires pour promouvoir notre spécificité culturelle et pour assurer que les citoyens et citoyennes canadiens aient accès aux oeuvres des artistes et producteurs canadiens.

8. Aucun chapitre sur l’investissement : Aucun droit ne devrait permettre à un investisseur ou une société privée de contester directement les lois et règlements d’un gouvernement étranger, qui est partie à l’accord commercial, devant des tribunaux privés, mais ce droit de contester devrait relever uniquement de l’autorité gouvernementale compétente. Le Canada devrait plutôt entamer immédiatement des négociations avec les États-Unis et le Mexique pour retirer les dispositions relatives aux droits des investisseurs contenues dans le chapitre 11 de l’ALÉNA.

9. Droits syndicaux : Un accord concernant les enjeux syndicaux sera vide de sens si les droits des travailleurs et travailleuses sont restreints par des dispositions relatives aux droits des investisseurs, relégués dans des accords parallèles et défendus par des sanctions non obligatoires et non exécutoires. Les investisseurs devraient être obligés de se conformer aux normes les plus élevées. Les organisations syndicales devraient faire partie du processus de prise de décision économique et social. Tout accord global doit s’engager à améliorer les normes du travail et à renforcer l’inspection et l’exécution des mécanismes liés au droit syndical, spécialement pour ce qui a trait aux travailleurs migrants et à tous ceux qui font face à des situations économiques et sociales précaires. La résolution des conflits doit être fondée sur une procédure de règlement des plaintes indépendante et transparente comportant un mécanisme supranational d’exécution lorsque les États refusent d’assumer leurs propres obligations. Le Canada doit ratifier les trois conventions fondamentales de l’OIT qu’il n’a pas encore ratifiées ainsi que les conventions prioritaires pour la bonne gouvernance.

10. Respect et protection des droits autochtones : Le Canada a récemment promis de ratifier la Déclaration de l’ONU sur les droits des peuples autochtones (UNDRIP). Bien qu’il s’agisse d’un pas dans la bonne direction, une mise en oeuvre adéquate requiert que le gouvernement reçoive un consentement libre, préalable et informé de la part des peuples autochtones toutes les fois que les droits autochtones sont susceptibles d’être affectés par une quelconque décision gouvernementale. En raison du fait que l’accord Canada-UE proposé est d’une telle ampleur qu’il aura indubitablement un impact sur les droits autochtones, l’accord doit se prononcer en faveur du maximum de protections pour les droits des peuples autochtones en conformité avec l’UNDRIP en tant que norme internationale la plus élevée, spécialement dans le cas des industries étrangères exploitant leurs activités sur les terres, les territoires et les eaux autochtones.

11. Viabilité écologique et action climatique : Le réchauffement mondial ayant déjà atteint un seuil critique et la majorité des écosystèmes de la planète étant au bord de l’effondrement, les dirigeants politiques doivent reconnaître la capacité de tolérance limitée de la planète et le rôle causal de l’accroissement du commerce mondial sur l’augmentation des émissions de gaz à effet de serre (GES). Les engagements envers le développement durable contenus dans les accords commerciaux canadiens et européens actuels, ainsi que ceux qui sont en cours de négociation, ne protègent que dans une très faible mesure notre air, la terre et les eaux des activités des entreprises. Entretemps, ces accords permettent de protéger les investisseurs des réglementations coûteuses, et de pérenniser des structures commerciales non viables. Un changement fondamental de politique plaçant les préoccupations relatives à l’environnement, à la santé publique et aux droits de la personne au-dessus des intérêts limités des entreprises s’impose au Canada et en Europe.

Nous avons signé

Alliance de la Fonction publique du Canada
Association des infirmières autorisées de l’Ontario
Association Québécoise pour la Taxation des Transactions Financières et pour l’Action Citoyenne (ATTAC Québec)
Canadian Health Coalition
La Coalition canadienne des jeunes pour le climat
Common Frontiers
Conférence canadienne des arts
Le Conseil des Canadiens
Ecologistas en Acción (Espagne)
Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec
Fédération du travail des Territoires du Nord
L’Institut Rideau
Indigenous Environmental Network
Association Internationale des Machinistes et des Travailleurs et Travailleuses de l’Aérospatiale
Polaris Institute
Le Sierra Club Canada
Science for Peace
Syndicat canadien de la fonction publique
Syndicat canadien de la fonction publique de l’Ontario
Syndicat canadien des communications, de l’énergie et du papier
Syndicat canadien des travailleurs des postes
Syndicat des Métallos
Syndicat des travailleurs canadiens de l’automobile
Syndicat national des cultivateurs
Syndicat national des employés généraux du secteur public
Union Paysanne
L’Union nationale des fermiers

Consultez l’article original sur Presse-toi à gauche.

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