Il existe une stratégie bien connue pour décrédibiliser un syndicat : lui faire porter les responsabilités d’une règle impopulaire …. Le comble de cette manœuvre, c’est quand en plus le syndicat en question combat cette règle ! Chronique d’une journée ordinaire à la permanence du SÉtuE …
Premier épisode : Discriminations et désinformations
Premier appel de la journée : « Diplômée d’un bacc en histoire, je suis désormais au baccalauréat en danse à temps partiel : à cause du SÉtuE, je ne peux pas devenir correctrice en histoire ! Selon le département d’histoire, le SÉtuE me l’interdit, parce que je suis au premier cycle et à temps partiel !! Le département n’engage donc que des étudiant-es inscrit-es à temps plein aux cycles supérieurs, ce qui est discriminatoire et stupide ».
Effectivement, c’est discriminatoire. Ce n’est pas exactement ce que la convention stipule. Et de toute manière le SÉtuE s’y oppose.
L’article 8.05 de notre convention collective se lit ainsi : « Dans l’attribution des emplois, la priorité est accordée aux personnes étudiantes de cycles supérieurs admises et inscrites à temps complet ». Une convention collective fixe l’état d’un rapport de force au sein d’un processus global de négociation entre un Employeur et les Employé-es, via le Syndicat. Tout ce qui est dans la Convention n’est donc ni la pure volonté patronale ni l’expression parfaite des revendications syndicales, mais bien la cristallisation d’un compromis temporaire entre les deux parties.
L’état de ce compromis, c’est que les départements peuvent prioriser l’embauche des personnes inscrites à temps plein aux cycles supérieurs. Le problème, c’est que depuis quelques mois, les ressources humaines ont donné comme consigne d’interpréter cette priorité comme une exclusivité ! C’est un peu comme le gel des frais de scolarité qui devient une indexation … Cette interprétation est abusive et nous nous y opposons.
En outre, c’est effectivement une pratique discriminatoire, notamment à l’égard des parents étudiants et des personnes en situation de handicap, qui sont d’ailleurs considérés par l’AFE comme personnes étudiantes à temps plein même lorsqu’inscrites à temps partiel. La discrimination à l’égard des premiers cycles participe de la course au financement dans laquelle sont lancées les universités, soit la course à la diplomation des étudiant-es de cycles supérieurs. Le financement par EETP (équivalent étudiant temps plein), selon lequel un diplômé de cycles supérieurs « vaut » plus qu’un diplômé de premier cycle, a donc des impacts jusque dans la convention collective du SÉtuE !
Cette exclusivité donnée aux personnes étudiantes aux cycles supérieurs à temps plein révèle en réalité une vision très élitiste de la formation universitaire. Elle produit ainsi deux catégories d’étudiant-es : celle, restreinte, d’étudiant-es privilégié-es cumulant les ressources et les formes de financement, et celle, bien plus large, de personnes étudiantes travaillant en dehors de l’université, donc souvent avec un salaire moindre et dans un domaine non valorisé académiquement. Ces dernières rentrent plus facilement dans un cycle d’endettement et de prolongation involontaire des études, obtenant plus difficilement par la suite des bourses par exemple. Pour toutes ces raisons, nous continuerons, dans nos prochaines négociations, de combattre cette priorisation abusive.
La suite au prochain épisode de notre chronique de l’antisyndicalisme uqamien ordinaire…